23 juillet 2024
Immersions : la Toscane méconnue
En marge de ses villes musées, la Toscane offre une constellation de villages miraculeux, suspendus entre terre et mer. Sa côte balnéaire ? Trop souvent snobée, et pourtant typique. Andiamo pour la slow dolce vita.
Par Nadia Hamam
Collines serties de cyprès, champs de blé, plages léchées par la mer Tyrrhénienne… Les paysages de Toscane ont inspiré artistes, écrivains et réalisateurs de renom.
L’historien Fernand Braudel décrivait même ces géographies magnifiées par la main de l’homme comme les plus émouvantes du monde. Avec leurs ruelles pavées jalonnées de palais et leurs nuances terracotta baignées dans une lumière dorée, les villages toscans jouent leur partition avec grâce.
Beauté et douceur de vivre
Au bout des petites routes de campagne toutes en parfums herbacés, les bourgs de Toscane sont de véritables bouffées d’art et des pans d’histoire. Si nombreux. Tous singuliers. Ils rivalisent par leur patrimoine de pierre. À San Gimignano, on déambule dans la vieille ville, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, et la Piazza della Cisterna. À Greve in Chianti, il faut se balader sur la ravissante Piazza Matteotti puis visiter le village médiéval de Montefioralle, tout proche.
Église néo-romane de Castellina in Chianti ; remparts médiévaux de Radda in Chianti, vue saisissante sur le Val d’Orcia et le Val di Chiana, à partir du village de Montepulciano, perché sur son éperon rocheux… la liste des trésors est longue. Alors on prend son temps, et saisit les instantanés d’une dolce vita à la toscane. Placettes animées, mammas en goguette et bambini turbulents, bars envoyant leurs bruschettas pour l’apéro.
La vie y est aussi nature que culture, à l’image de Volterra, forteresse massive planant à 500 mètres d’altitude au-dessus de la vallée de Cecina. Rendue célèbre par la saga Twilight, la bourgade conserve dans ses pierres les traces de son histoire : Porta all’Arco de la période étrusque, théâtre romain datant de l’empire, façade couverte de blasons du Palazzo dei Priori, bâti au XIIIe siècle… la superposition des époques, flagrante, reste harmonieuse. En matière d’équilibre visuel, la palme revient toutefois à Pienza. La « cité idéale » a été conçue comme une œuvre d’art, au XVe siècle, sous l’impulsion du pape Pie II et le crayon de l’architecte Bernardo Rossellino. L’idée : organiser les espaces et les perspectives afin que les villageois vivent en paix et en osmose avec la nature.
Les amateurs de bien-être pourront, quant à eux, expérimenter les somptueux thermes de Montecatini Terme ou ceux de Saturnia, ville également réputée pour ses piscines naturelles. À San Casciano dei Bagni, les sources thermales rivalisent désormais avec 24 statues de divinités en bronze datant de l’époque étrusqueromaine, découvertes récemment… sous les bains !
Des saveurs uniques
D’un village à l’autre, marchés de poche, ateliers d’artisans et trattorias livrent des recettes précieuses, partagent des gestes ancestraux, initient à une hospitalité spontanée, sans fioritures. Exhausteur de goût au naturel : la lenteur ! Il faut déguster quelques-uns des 32 produits classés AOP et IGP avec entre autres : la truffe blanche de San Miniato (capitale mondiale du précieux champignon, s’il vous plaît) ou encore la collection de châtaignes locales.
À San Gimignano, on fait le plein de safran pur, traité à la main. Autour de Sienne, on égrène les biscuits de caractère (tendres ricciarelli, croquants cantuccis, ou encore le fameux panforte). Sans oublier les fromages et les charcuteries locales qui accompagnent naturellement les célèbres vins de Chianti.
Drapée de vignobles et d’oliviers, la vallée éponyme fait la réputation de la Toscane. Pour la découvrir, on s’élance en voiture sur la route Chiantigiana (ou SR 222), ou mieux, on enfourche un vélo pour vivre les 185 kilomètres du « giro del Chianti Classico » (« le tour du Chianti »). De village en village, au départ de Florence, de splendides sentiers vignerons écument les collines, passant d’abbayes médiévales en propriétés viticoles qui proposent des dégustations.
Une côte méconnue
En Toscane, il suffit de parcourir quelques kilomètres en direction de l’ouest pour trouver un rivage à mille facettes, unifiées par les eaux cristallines de la mer Tyrrhénienne. Au nord, c’est l’effervescence et le glamour du littoral de Versilia, prisé des acteurs ou des écrivains.
Dans son film Le Fanfaron, (1962), Dino Risi saisit en noir et blanc, et en décapotable, une région idyllique, vibrante, entre boîtes de nuit modeuses, plages privées, et demeures d’aristocrates. Une atmosphère que l’on retrouve encore au fil de célèbres stations comme Viareggio (très connue pour son carnaval et ses dunes), Bagno Ariston, Forte dei Marmi ou encore Bagno Pietro. Plus bas, en dessous de Livourne, la côte des Étrusques descend jusqu’à Populonia. Autre station qui se démarque par son charme : Bagno Le Forbici, à Castiglioncello.
Le sud aussi sait faire chanter ses sirènes balnéaires. En tête, le petit village Castiglione della Pescaia, dont les eaux impeccables lui ont valu le surnom de « Petite Suisse ». Une halte s’impose à Piombino, petite ville aux airs de Camargue, flamants roses inclus. De son port, on attrape l’un des ferries pour les îles d’Elbe, de Giglio, de Giannutri ou de Pianosa. À moins de faire une pause au golfe de Baratti, pour une séquence snorkeling ou une visite des ruines de Populonia.
Enfin, au sud du sud, affleurent les ambiances intimistes (le village de Quercianella perché sur ses falaises)… et sauvages, à l’approche du parc naturel de la Maremme. Là, ne s’aventurent qu’une poignée de touristes étrangers ou les plus bobos des bobos italiens. Un monde à part à découvrir en train régional, pour un voyage slow et écolo entre mer et maquis. Étape au fil des rails : l’agréable Talamone, à l’ombre de la forteresse Aldobrandesca. De là, il faut relier la lagune d’Orbetello, un écosystème riche d’oiseaux migrateurs. De l’autre côté des eaux, se dresse le promontoire de l’Argentario : la plus confidentielle d’entre toutes ces escales. Fréquenté par l’élite internationale, le confetti de roche perdu dans la mer s’explore à vélo (électrique, ça monte !) ou en scooter. Maisons colorées, sentiers de randonnée panoramiques aux parfums d’aiguilles de pin et de genêt… et des criques secrètes où l’on se retrouve seul au monde, même en plein été.
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